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Eden
Dossier réalisé par petitboulet, lui tout seul :o)
Cette première partie comporte une introduction au monde d'Eden.
Un développement des thématiques dominantes est fait dans la deuxième partie



  • Pourquoi faire un dossier sur Eden?

    Premièrement, parce que j'en avais envie, et cela ne se commande pas :o)
    Ensuite, il y a sûrement une part d'exaspération sur le rapport des français au manga, et particulièrement des bédéphiles. En général le manga est traité comme la 5ème roue du carosse de la BD, cantonné à la débilité, à la violence gratuite et au sexe, alors qu'il fait partie d'un genre, la BD, déjà considéré comme un sous-genre de littérature, une lecture pour enfants et relativement débilitante par une bonne frange de la population. Exaspération par rapport à cela déjà, et puis par rapport au fait que sur les forums, on ne parle que de certains auteurs et de certaines séries, en délaissant les autres. Exaspération d'entendre que Taniguchi sort du lot des auteurs manga parce qu'il fait plutôt de la bd européenne. Exaspération devant le fait que pour beaucoup, en dehors d'Otomo, Miyasaki, Urasawa et Taniguchi, point de salut, par méconnaissance en général, mais aussi parce que les préjugés ont la vie dure...

    J'avais envie de casser le mythe du manga plein de violence et de sexe gratuit, en parlant du plus violent que j'ai jamais lu, en montrant qu'Hiroki Endo utilise cette violence comme un outil pour montrer ou plutôt assener comme une baffe sa critique de la société. Une preuve que l'on peut faire quelque chose d'unique et de remarquable à partir de la violence.

    Et puis en relisant j'ai redécouvert certaines choses, notamment sur le rapport à la religion, sur les personnages, sur la qualité et le potentiel énorme de ce manga, sur l'intelligence de la manière de raconter, la subtilité des rapports humains....

    Alors voilà ma vision d'Eden. Certainement pas la seule, certainement pas celle qui fait autorité, juste ma vision. Lisez le dossier, s'il vous intrigue, lisez le manga, et si votre vision du manga change un peu, j'aurai ma récompense :o)

    Bonne lecture.



  • Le monde d'Eden.

    Les personnages d'Eden évoluent dans un monde ravagé par un virus rendant les hommes durs et cassants comme de la porcelaine. Le but premier en ces temps troublés est de survivre à n'importe quel prix, et pour ce faire tous les moyens sont bons: trafics, assassinats, implants cybernétiques pour remplacer les membres malades... les hommes tentent de faire leur petit bout de chemin dans cet univers dur et violent, entre cyberpunk, SF et vie contemporaine.

    Hiroki Endo a trouvé là un mélange subtil et rare, particulièrement réaliste et travaillé, fouillé jusqu'à la moelle, et s'avère aussi à l'aise pour décrire des paysages désertiques (l'île du premier tome, les grandes étendues d'Amérique du Sud pour les suivants), et leur ambiance calme, contemplative, même pendant les scènes de combat, que des villes animées (à partir du tome 4). Ce talent se vérifie lorsqu'il s'agit de mélanger les genres. Eden est en effet un melting-pot subtil et cohérent de manga guerrier ultra réaliste, (notamment le tome 3, un véritable exercice de style en ce domaine), de cyber punk et de SF, auxquels sont ajoutées une ambiance de polar sur les derniers tomes, ainsi qu'une trame sentimentale en toile de fond mais si Hiroki Endo est un créateur d'univers de premier ordre, son talent s'affirme encore davantage lorsqu'il s'agit d'intégrer et de brosser ses personnages..


    On ne peut pas vraiment dégager de personnage principal dans Eden, même si l'histoire semble se dérouler autour de la famille Ballade, et plus particulièrement d'Elia Ballade. Hiroki Endo nous plonge dans un maëlstrom de caractères, de vies totalement différentes, mais avec souvent un but commun: survivre. Au premier abord cyniques, désabusés, indifférents des horreurs qui les entourent, blasés, parfois, du fait de leur corps remplacé par du métal, ce sont en réalité de véritables ecorchés vifs, qui se défendent comme ils peuvent dans un monde qui, ils le savent pour l'avoir experimenté maintes fois, ne leur fera pas de cadeau. Ils se révèlent remplis d'émotions pleins d'un désir de vivre contrastant avec leur apparence froide et indifférente, et profondément humains. Il n'y a pas un seul personnage qui soit totalement négatif, ni un seul totalement positif. On navigue dans différents niveaux de gris, et le grand talent de Hiroki Endo est de nous les rendre tous touchants, mercenaires sanguinaires, prostituées junkies, traficants de drogues, cyborgs n'ayant plus grand chose d'humain, tous nous touchent, parfois nous bouleversent, tous ont leur histoire, largement dépeinte, on s'identifie à chacun d'eux parce que ce sont des hommes, tout simplement.

    De ce fait, Eden s'avère débordant de vie et de fraîcheur, de sentiments humains surtout, son auteur réussit à mélanger récit de guerre, polar, récit sentimental, SF et cyberpunk avec bonheur, et réussit le tour de force de nous immerger totalement dans son monde, entre désespoir et volonté farouche de vivre.


  • Les personnages

    Une galerie impressionnante de personnages, principaux ou secondaires se croisent dans Eden. Voici une petite sélection agrémentée d'une description rapide. Cette partie est bien sûr appelée à être augmentée par la suite, Eden étant encore en cours à ce jour.

    Enoa ou Ennoia Ballade: seul rescapé avec Hanna et Rain d'une maladie mystérieuse qui change les corps en pierre, Enoa vit sur une île qui fut une base militaire et de recherche. Il adore travailler la terre et faire pousser des choses. Enoa deviendra 20 ans plus tard le plus grand producteur de drogue d'Amérique du sud.
    Hanna Mayool: rescapée de l'île avec Enoa et Rain. Comme Enoa, elle n'a eu aucune séquelle de la maladie. Elle est innocente et douce, et a une affinité avec les animaux. Elle sera la femme d'Enoa avant de divorcer. Elle a eu 3 enfants avec Enoa, et Elia est le deuxième. L'aînée est morte par suicide.
    Rain Morris: professeur chargé d'étudier la maladie qui décime la population. Il est homosexuel, plutôt désabusé, amoureux du père d'Enoa. Il ne croit plus en l'humanité, mais ne peut se résoudre à mettre fin à ses jours alors qu'il souhaite la fin de l'humanité. Il est malade mais essaye de se soigner grâce au sang d'Enoa et d'Hanna. Il envie les convictions de Chris Ballade et le considère comme un héros.
    Chris Ballade: Commandant en mission pour les Etats Unis sur l'île. Il est militaire et patriote, idéaliste. N'aime pas les autres militaires qu'il considère carriéristes. Père d'Enoa et mari de Linda Oleek. L'idéalisme de Chris le poussera à la trahison et à intégrer le PROPATER... la vie va t-elle garder cet idéalisme intact?
    Linda Oleek: Femme de Chris Ballade. Il l'a rencontrée pendant une mission pour l'ONU en Albanie, elle l'a suivi et ils se sont mariés. Ses sentiments sont ambigus.
    Chérubin: Chérubin est une intelligence artificielle. On ne sait pas très bien jusqu'où va son degré d'humanité. Il protège Enoa puis Elia. Il fut à l'origine de l'extermination des habitants de l'île.
    Elia Ballade: fils d'Enoa et d'Hanna. Le personnage autour duquel tourne l'histoire. Elia est un jeune garçon. Alors qu'il rôde autour d'une grosse ville déserte en Amérique du Sud il se fait capturer par un commando du NOMAD. Elia va supporter un sentiment de culpabilité grandissant au fil des pages, ce qui va l'obliger à mûrir trop vite, à devenir adulte. Elia a deux soeurs, Mana et Gina. Gina est morte, elle s'est suicidée, et Mana est avec sa mère.Il éprouve des sentiments très forts d'amour et de protection à l'égard de Mana.
    Le Colonel Nazarbaief: le chef d'une troupe de mercenaires du NOMAD, baroudeur aguerri. Il va faire Elia prisonnier. Un homme intègre. Il est Géorgien, et fut islamiste, mais a du fuir son pays et l'épuration ethnique qui a massacré une partie des siens. Maintenant il fait partie du NOMAD.
    Wycliffe: Un des membres du commando de Nazarbaief. Wycliffe est spécialiste en explosifs.
    Kenji: L'un des personnages les plus ambigus et les plus intéressants. Kenji est en façade un tueur surdoué, une véritable machine a tuer, sans sentiments, efficace, rapide et silencieux. Mais il est au bord de la folie à force de ne pas exprimer ses sentiments, et de refouler sa tristesse, et surtout sa colère, une colère énorme à l'égard du monde. C'est un homme complètement perdu et qui se raccroche à la seule chose qu'il sache faire pour avancer: tuer. Mais c'est un cercle vicieux: en tuant, il n'amène que destruction et vide, et il se dégoûte lui même et entretient sa haine, ce qui le dégoûte un peu plus encore . Il entretient une relation amour/haine avec le colonel Nazarbaief, qu'il voudrait pouvoir considérer comme son père. Mais un obstacle de taille les en empêche...Le frère de Kenji...

    Sofia: experte en informatique et en cybertechnologies, cette femme a complètement changé de corps, ne laissant que son cerveau d'origine, et encore, elle dispose d'une mémoire limitée, si elle veut l'agrandir, elle doit s'enlever des souvenirs... elle a abandonné ou essayé de tuer ses huit enfants. Sofia est elle aussi une écorchée vive, elle éprouve d'ailleurs des sentiments ambigus pour Kenji, le personnage le plus proche d'elle émotionellement dans Eden, et en même temps presque son antithèse. Alors que Chenils présente une façade lisse, sans aspérité, Sofia cache sa détresse derrière un masque de gaieté forcée, mais elle tente maladroitement de s'ouvrir au monde. Paradoxalement, c'est après qu'elle a changé de corps qu'elle a redécouvert les sensations, et qu'elle a pris conscience de son humanité, elle qui n'était qu'une machine insensible avant cela.
    Helena : Helena est une jeune prostituée. Elle a un caractère entier, des idées bien arrêtées et n'hésite pas à dire ce qu'elle pense. Courageuse, elle s'avère ne pas être désabusée, son cynisme n'est qu'une façade, et elle sait aussi se montrer douce et vulnérable.
    Cachua: Cachua est une fille de village. Elle a fui son village à cause d'une purification ethnique, ce qui la rend sympathique vis-à-vis de Nazarbaief qui a vécu la même chose. Elle est timide et douce, tout le contraire en apparence d'Helena. Elle est déjà brisée par la vie, s'étant fait plusieurs fois violer. La personne dont elle va s'avérer la plus proche est Wycliffe. Une amitié forgée par les circonstances va naître entre ces deux personnages.
    Maya: Un être artificiellement créé par le Propater, qui peut vivre dans les mémoires des ordinateurs. Maya est théoriquement immortel, et sa descendance, les aions, sont des machines à tuer exceptionnelles. Son rôle est encore flou dans Eden.
    les aions: des soldats génétiquement créés, surdoués dans leur domaine, la tuerie. Les aions ont des membres extensibles terminés par des mains aussi aiguisées que des couteaux, et sont apparemment insensibles à la douleur. Leur cerveau n'a pas l'air très développé.
    Rico: Lieutenant de police dans la ville où atterrit Elia. Homme intègre et entier, il est né dans les quartiers pauvres et la misère et le système d'asservissement de la pègre par rapport aux pauvres le dégoûte. Il fut une connaissance de Pedro, avant que celui ci ne travaille pour Automater.
    Manuela: Manuela est une jeune prostituée. Elle est accro à l'héroïne, et a déjà vendu son fils pour s'acheter sa drogue. Manuela est un des personnages les plus touchants et en même temps un des plus révoltants. Elle subit complètement les événements, complètement dépendante de la drogue et donc de ceux qui l'approvisionnent. Manuela est l'exemple parfait des dégâts que la misère engendre, sa personnalité est complètement annihilée par le désir de drogue.
    Pedro: Pedro est un caïd de la pègre locale, qui veut renverser le règne de Tony sur la ville. Violent et sans scrupule, Pedro tue à tour de bras sans remords. Mais il est amoureux fou de Manuela, au point de vivre avec elle une relation d'esclavage mutuel et de renoncement de la fierté. Manuela est dépendante de la drogue et donc du fournisseur, il sera ce fournisseur, abandonnant son amour propre pour être avec celle qu'il aime.
    Cesy: la fille de Manuela. Cesy est pleine d'énergie et de vie, d'optimisme aussi. Elle parait être l'antithèse de sa mère, mais est plutôt le portrait que sa mère était avant la drogue. Cesy incarne tous les enfants du monde, leur pureté avant que la misère ne s'abatte sur eux et ne les broie.
    Tony: Tony a la main haute sur les activités illégales de la ville. Il est le bras droit d'Enoa, il tente donc de protéger Elia.
    Automater: son rôle dans les albums n'est pas encore très clair. Elle dirige une faction de la pègre qui n'est pas sous le contrôle de Tony, et a l'air d'avoir beaucoup d'influence. A une relation amour/haine avec Enoa, et semble beaucoup tenir à Elia.



  • Deuxième partie du dossier, contenant une analyse personnelle sur les thématiques de la violence et de la religion. (Spoilers inside ;o) )


  • Le sujet dédié, pour parler d'Eden.

  • Les chroniques sur chaque album:


    Tome 1

    Tome 2

    Tome 3

    Tome 4


    Tome 5

    Tome 6

    Tome 7



Lectures parallèles à Eden: Nouvelles

Un seul autre ouvrage d'Hiroki Endo a été publié en France, ils s'agit de Nouvelles, qui contient...des nouvelles! :o) 3 pour être clair et précis. Et pour les deux premières en tous cas le moins que l'on puisse dire est que ca n'engendre pas la gaieté, loin de là.

  • Le corbeau, la fille et le Yakusa: un yakusa blessé est recueilli par une jeune fille qui élève des corbeaux... Cette nouvelle traite de la faiblesse, et de la rébellion contre cette faiblesse. Le Yakusa est en fait un homme faible qui a réussi à se faire une place chez les oppresseurs, et retrouve son monde d'antan à travers la jeune fille aux corbeaux... et s'aperçoit qu'il n'a pas changé d'un iota, qu'il reproduit le même schéma que ses oppresseurs d'antan et qu'il est toujours aussi faible... une histoire prenante et bouleversante, très violente par brèves mais très intenses envolées, comme souvent chez Hiroki Endo. Une histoire servie par un dessin toujours aussi fin et réaliste. L'auteur n'hésite pas à défigurer son héroïne. Très fort au niveau émotions, et très bien construit, particulièrement noir et oppressant par moment, mais qui se réserve une part de légèreté (les planches avec des vues d'oiseaux) et d'optimisme diffus.


  • L'éducation sentimentale: Une histoire qui démarre de façon anodine pour s'enfoncer dans le cauchemar complet. Une jeune fille se retrouve dans un engrenage qui va la faire dériver jusqu'à la folie et le meurtre. Contrairement à son habitude, l'auteur nous propose ici une histoire sans salut, sinon dans la mort, une histoire qui avance implacablement jusqu'à son dénouement inévitable, presque mécaniquement, et une histoire où la violence n'est pas montrée, seulement suggérée. Et ça marche. Le but d'Hiroki Endo est toujours de nous montrer les causes de la violence, mais il emploie une méthode assez différente, ce qui donne un côté oppressant plutôt que dégoûtant, et qui fait que la jeune fille garde son aura d'innocence qui la rend si touchante. Elle est complètement inhibée, mangée par sa sœur aînée morte, elle veut devenir la petite fille modèle que sa sœur était sans succès, et cela la pousse à la folie, au cynisme aussi. L'histoire dont les pages m'ont le plus marqué.


  • A ceux qui ne croient pas en Dieu: Une troupe de théâtre de lycée ou d'université joue une pièce sur un meurtrier récidiviste, et s'interroge sur Dieu. Il s'agit d'une histoire complètement différente des autres: ici point de violence, même si on parle dans la pièce d'un serial killer. Hiroki laisse transparaître la joie de vivre des personnages, l'émoi des premiers amours, la redécouverte de l'être aimé... sûrement la plus ambitieuse des trois nouvelles, elle est aussi un peu plus confuse dans sa réalisation. Mais elle n'en est pas moins remarquable et comme toujours laisse éclater les sentiments des personnages en 2 phrases et en un sourire à peine esquissé, mais qui vous prend aux tripes... passionnant et troublant.


Nouvelles n'est donc pas du tout un ouvrage mineur d'Hiroki Endo, il traite des mêmes thèmes qu'Eden d'une manière un peu différente, mais toujours avec autant de réussite et de classe. A lire absolument.

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